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Lancés dans la vie par la Jeunesse Agricole Catholique !

La JAC (Jeunesse agricole catholique) a 90 ans en 2019. Ce mouvement a formé des personnes qui sont encore actuellement au CMR (Chrétiens dans le monde rural). Pour le dernier numéro de la revue « Agir en rural », qui portait sur l’éducation – y compris l’éducation populaire -, Annie Le Mercier, présidente du MCR 22 a rencontré Charles et Jeanne qui habitent en Côtes d’Armor.

Propos recueillis par Annie Le Mercier – CMR22

Jeanne a 81 ans, mais elle s’étonne encore à quel point la JACF, qu’elle a connu à 18 ans, a transformé son parcours de vie . « Moi, avec seulement mon certificat d’études, je me lançais à inviter des jeunes en réunion. Une dizaine de gars et filles. En vélo, même la nuit. On n’avait peur de rien. Y’avait que ça pour nous sortir. On a fait la route mariale, et après du théâtre … Avec la vulgarisation, on apprenait à s’organiser, savoir où poser ta fourche pour économiser tes pas, apprendre à faire des yaourts dans des boites en carton, avoir l’idée de les vendre… J’osais écrire pour demander des conférenciers (j’ai même écrit au ministère à Paris). Il y avait des sessions de formation. Il y en a eu une à Nantes: il a fallu prendre le train, changer de train… 

« Le mouvement, ça m’a débloquée, libérée, épanouie ; je n’étais pas malheureuse dans mon enfance,  mais je ne voulais pas de cette vie-là : se lever au petit matin pour biner les artichauts, tourner le lin, garder les vaches au bord des routes avec la hantise qu’elles se mélangent aux autres troupeaux… Au point que jamais je n’aurais voulu un mari paysan. Avec la JAC, on apprenait ensemble à faire évoluer le métier, et du coup à l’aimer, à en être fier. C’était mixte, mais on y allait pour la militance, et pas forcément pour trouver un garçon …

Je me suis ouverte à d’autres milieux ; par exemple un jour j’ai accepté une invitation dans une propriété, dans un monde qui n’était pas le mien… Ouverture au monde aussi : j’ai été  au congrès à Lourdes, et à la suite on a accueilli une fille de Côte d’Ivoire pendant un mois, et aujourd’hui, je suis encore ce qui se passe en Côtes d’Ivoire. Et pourtant chez moi, aller vers les autres ce n’était pas inné. Mais l’esprit qui nous poussait c’était qu’on était tous enfants de Dieu, faits pour nous élever, et être plus à la ressemblance du Christ. »

Et… à la JAC, Jeanne a rencontré Charles, militant depuis ses 16 ans. Profession: agriculteur !

« J’avais arrêté l’école à 15 ans ; je me suis trouvé embarqué à la JAC avec des plus vieux que moi. Je me souviens d’une session sur l’éthanol dans les carburants… Un aûmonier avec qui je n’avais pas été d’accord … Une autre session sociale : des gens qui parlaient de l’avenir de l’agriculture. Des sessions de 3 jours pour des responsables nationaux. Avec tout ça, je m’apercevais qu’il y avait du développement à faire au niveau économique, et que des techniques pouvaient y aider(insémination artificielle…). J’ai pris peu à peu des responsabilités (congrès du MIJARC en 1960).

« Ma période militaire en Afrique du Nord m’a fait côtoyer des ouvriers qui avaient une conscience syndicale que je n’avais pas encore. Au Maroc, j’étais dans une équipe très mélangée sociologiquement : 2 gars avaient fait l’ENA et Sciences Po. Je suis revenu d’Afrique du Nord enragé : il faut changer ce monde de l’intérieur ! Cen’est pas possible qu’on traite le paysan comme ça ! Je suis devenu syndicaliste , la FDSEA à l’époque . J’ai pris des responsabilités dans une coopérative . Dans les années 70-75, un développement a été possible. Mais au bout d’un moment , j’ai commencé à voir que c’est l’économique qui aurait le pouvoir, et je n’ai pas compris les positions de ceux qui étaient en responsabilité comme moi(avec la maturité politique qu’ils avaient pourtant) . J’ai été de ceux qui sont devenus « Paysans Travailleurs », et en CMR c’est devenu compliqué . Il a fallu qu’on arrive en retraite pour que je retrouve le CMR .

De la JAC je retiendrai qu’elle m’a appris à ouvrir les yeux sur les autres, à faire évoluer tout le monde ensemble, à innover (quand je me suis associé avec notre salarié_impensable jusque-là_, quelqu’un du CMR m’a dit :  « ton association, ça fait causer, en bien ! ». Beaucoup de responsables sont passé par la JAC. Des responsabilités qui pèsent : dans ma coopérative, les décisions engageaient 20000 éleveurs et 3000 salariés. »

Et Jeanne de rajouter :  « Quelques femmes aussi se sont engagées : moi j’ai été trésorière de la maison familiale. J’en connais une autre qui a fait de belles choses comme conseillère municipale. Et beaucoup d’autres … Quand je vais aux sessions du CMR aînés chaque année, et que j’écoute ce que font les gens, même à nos âges, je suis émerveillée de ces retombées formidables ».

En solex, en scooter, lancés dans la vie par l’action catholique et l’éducation populaire !

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