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Lamballe. Rencontre sur le thème 'La fraternité, cela ne se décrète pas, cela se vit ?'

Dans le cadre du Festival Notre Dame, organisée du 25 avril au 1er mai 2022 par la Paroisse Notre-Dame de Grande Puissance sur le thème « Liberté, égalité, fraternité. Où en sommes-nous de la fraternité ? », une rencontre a eu lieu mardi 26 avril au lycée Saint-Joseph de Lamballe, en présence notamment de Frère Thierry Hubert, dominicain producteur du Jour du Seigneur ; et de Jacques Le Goff, éditorialiste de Ouest-France.

Festival Notre Dame 2022 - Paroisse ND de Grande Puissance

« Hier soir, lors de la conférence de Samuel Gicquel autour de l’histoire de la devise ‘Liberté Égalité Fraternité’, on s’est posé la question de savoir s’il fallait remplacer le mot ‘fraternité’ par celui de ‘solidarité' », a introduit Pierre Labbé, l’un des organisateurs du Festival Notre Dame, lors de la soirée du 26 avril.

Mot du Père Laurent Le Meilleur, curé de la Paroisse Notre Dame de Grande Puissance : « La fraternité : un thème d’actualité criante ! Avec l’équipe de pilotage, nous y réfléchissons depuis plus de deux ans… avant la sortie de la lettre ‘Fratelli tutti’ (tous frères) du Pape François ! La fraternité a une grande valeur pour toute l’humanité, croyant ou non. Elle a besoin d’être découverte, aimée, expérimentée, annoncée et témoignée. »

Intervention de Frère Thierry Hubert, dominicain
Producteur du Jour du Seigneur (France 2)

« La fraternité, si j’en parle comme dominicain, je dirai que l’Ordre ne lisse pas le caractère mais plutôt le déploie. Je vis avec vingt Frères », sourit Frère Thierry Hubert en guise d’introduction. « Frère Dominique a institué la fraternité au cœur de notre Ordre. Nous n’avons pas de père abbé. Le prieur applique la politique qu’ont voté les Frères. Nous obéissons donc à un consensus commun. » Ce dernier a interpellé l’assemblée nombreuse, composée d’une centaine de participants. « Je voudrais vous renvoyer à une question. Si nous avons tous un arbre généalogique, a-t-on dans notre vie un arbre de la fraternité ? Est-ce que dans nos cercles de relations, nous avons appris à être frères et sœurs ? Qui m’a engendré dans la relation à l’autre ? »

Frère Thierry Hubert a démontré qu’il existait « un parallèle entre la joie et la fraternité ». « La joie ne se décrète pas. La fraternité ne se décrète pas non plus d’un coup de baguette magique », explique-t-il. « Comment définir la fraternité ? Dans nos familles, nos relations peuvent se dégrader autour de questions d’argent, par exemple. Ce qui apparaissaient comme des liens forts peuvent tomber. » Celui-ci a voulu dissocier la fraternité de l’amitié, qui est basée sur une rencontre réciproque. « La fraternité nous est donnés par la vie. Le pape François lui-même nous dit que nous avons besoin de plus de fraternité. »

Le frère dominicain a rappelé que « nous avons d’abord à penser à la fraternité, lui donner des contours, la définir ». Pour lui, dans la notion de « frères », « on a tous quelque chose en commun ; et en même temps, il y a de l’altérité qui permet à chacun de s’exprimer de manière unique et singulière. La fraternité se déploie dans un ensemble, nous sommes ‘un’ en Jésus-Christ ». Frère Thierry Hubert appelle à « s’entendre » des deux manières : « écouter l’autre, mais aussi le comprendre ». « Donnons la possibilité à l’autre de s’exprimer, de se révéler. Si on cherche à s’imposer, la fraternité ne passera pas. Pour être frères et sœurs, il faut accepter de ne pas s’imposer et laisser le vide créer des chemins de fraternité. »

Ce dernier a rappelé ô combien « l’homme était relation, comme Dieu est relation ». « C’est l’autre qui révèle la meilleure part de moi-même. L’hospitalité, c’est la ‘philoxenia’, l’amour de l’étranger. C’est le lieu où l’amour de Dieu s’infiltre. » Frère Thierry Hubert a souligné que la question de « la fraternité était éminemment spirituelle et éthique car elle influe sur nos valeurs, elle nous apprend à vivre ensemble dans la cité. La fraternité appelle avant tout à se vivre. »

Intervention de Jacques Le Goff
Éditorialiste au quotidien Ouest-France

« La devise républicaine ‘Liberté, égalité, fraternité’ va être valorisée dans la première moitié du XIXème siècle, avant que le terme de ‘fraternité’ ne décline et soit marginalisée au profit de celui de la solidarité qui prend alors une place sociale », explique en avant-propos Jacques Le Goff. « Nous sommes tous des êtres de relation interconnectés. Nous sommes tous dans la complémentarité, nous avons tous besoin les uns des autres au travers de nos charismes propres. »

L’éditorialiste a souligné que « la fraternité s’est estompée pour devenir la parente pauvre de la devise républicaine ». « La liberté et l’égalité sont éclatantes », s’exclame-t-il. « Mais quelle différence fait-on entre solidarité et fraternité ? La solidarité est fondée sur l’intérêt commun ; dans la fraternité, il y a une dimension de gratuité. La fraternité apporte à la solidarité, nous aurions tous à redécouvrir la fraternité comme principe actif de la solidarité. La fraternité, c’est la joie du partage. »

Jacques Le Goff a rappelé en signe de conclusion de son intervention « qu’on peut être solitaire bien que solidaire, jamais lorsqu’on est fraternel. Il est impossible d’être solitaire et fraternel.

La fraternité n’est pas que le résultat des conditions de respect des libertés individuelles, ni même d’une certaine équité observée. Bien qu’il s’agisse de présupposés qui la rendent possible, ceux-ci ne suffisent pas pour qu’elle émerge comme un résultat immanquable. La fraternité a quelque chose de positif à offrir à la liberté et à l’égalité.
Photo du pape François
Encyclique "Fratelli Tutti'
Pape François

Table-ronde et réactions

Thierry Andrieux, président de Lamballe Terre et Mer, était présent lors de la table-ronde qui a succédé aux interventions du Frère Thierry Hubert et de Jacques Le Goff. « Cela fait du bien pour des élus comme nous de prendre du recul et de vous écouter. Que veut dire la fraternité dans nos collectivités et dans nos politiques publiques ? », s’est-il questionné. « Je dis souvent que j’ai deux oreilles et une bouche pour écouter deux fois plus que je ne parle. On ne sait pas s’écouter et communiquer ensemble… C’est une vraie problématique entre élus. Nous n’apprenons pas toujours à nous connaître. » Pour ce dernier, l’objectif est clair, « nous devons co-construire ensemble en se respectant et accepter de corriger le tir lorsque cela est nécessaire ».

Pour Laurence Esposito, membre du Secours Catholique-Caritas France à Morieux, il s’agit de « permettre à chacun de prendre une place active dans la société ». « Acceptons d’être vulnérables, c’est-à-dire accessibles à autrui et accepter d’être touchés », a-t-elle appelé. « L’espérance nous porte, la fraternité est un long chemin dont on ne connaît pas toujours la destinée. »

Au terme de la soirée proposée dans le cadre du Festival Notre Dame, Frère Thierry Hubert a interrogé les participants : « Pourquoi autant d’hospitaliers se dévouent auprès des malades au Sanctuaire de Lourdes ? Parce que nous avons besoin de l’autre, du pauvre, pour découvrir ses propres vulnérabilités. »

fronton mairie
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