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La Congrégation des Filles de Sainte-Marie de la Présentation se raconte

La Congrégation des Filles de Sainte-Marie de la Présentation est née après la Révolution Française de 1789, en pleine restauration religieuse ! Après une histoire pleine de rebondissements, les « Sœurs de Broons » ont décidé de la raconter à travers une exposition à découvrir au sein de leur Maison-Mère jusqu’à la fin de l’année 2023. Vous souhaitez visiter l’exposition ? Rendez-vous au 27 rue de la Barrière, 22250 Broons. Merci de téléphoner à l’accueil avant tout déplacement, au 02 96 84 62 31.

Sr Marie-Louise à gauche, et Sr Solange à droite, Sœurs de Broons

Les origines des "Sœurs de Broons"

Tout débute en 1817, l’abbé Joachim Fleury devient curé de Broons, petite ville bretonne ayant souffert pendant la Terreur. Son église paroissiale a été saccagée avant de devenir, tour à tour, écurie et grenier à fourrage. Les enfants de la commune ne recevant aucune instruction, l’abbé Joachim Fleury ouvre en 1821 une école de garçons… mais restent les petites filles, les malades, les pauvres et la pratique religieuse abandonnés ! Autant d’appels pressant qu’il confie à la Vierge Marie… jusqu’au jour où un projet se dessine. L’abbé Joachim Fleury rencontre Louise et Laurence Lemarchand, et remarque leur vie chrétienne exemplaire. En octobre 1826, ils ouvrent deux classes pour jeunes filles, Louise et Laurence y deviennent institutrices, reçoivent des orphelins et visitent les malades.

Les deux femmes portent un projet dans le secret de leur cœur : devenir religieuses, projet qui se réalisera à la Toussaint 1827. Celles-ci prennent alors le nom de « Filles de Sainte Marie ». Le 13 septembre 1836 a lieu la bénédiction de la chapelle sous le vocation de « la Présentation de la Vierge » par l’évêque de Saint-Brieuc. La congrégation est constituée par ordonnance royale le 30 mars 1839 et connaît un essor rapide. Toujours fidèles à l’objectif qu’elles se sont fixé, les sœurs multiplient les initiatives pour catéchiser, instruire et soigner tout au long du XIXe siècle.

Par la loi du 6 juin 1881 – la loi Jules Ferry  -, l’école obligatoire et gratuite est imposée à tous les enfants. Les écoles, le plus souvent tenues par des religieuses, sont déclarées communales. Mais voilà qu’une loi de 1886 déclare laïques toutes les écoles publiques. La supérieure générale, Mère Sainte Euphrasie, voit les conséquences de cette loi : en effet, bien des écoles tenues par les sœurs sont publiques ! Expulsées, cinq Filles de Sainte Marie passent la frontière belge, le 17 octobre 1901. Grâce aux Salésiens de Liège, le diocèse s’ouvre aux exilés : « Si votre pays vous rejette, le Ciel ne vous rejette ni moi non plus », leur dit l’évêque de Liège. Puis, le 13 septembre 1902, six sœurs de Broons prennent la direction du Canada, puis du Nord Dakota (USA), le 30 juin 1903. « Venez chez nous, vous serez les bienvenues dans mon diocèse », leur écrit l’évêque de Fargo.

« L’Esprit Saint souffle là où Il veut ! », sourit Sœur Solange, Filles de Sainte-Marie de la Présentation actuellement animatrice en pastorale au Lycée Saint-Joseph de Lamballe. « Les sœurs ont été très dignes, très courageuses. Si elles n’avaient pas osé, nous ne serions pas là ! » Accompagnée de Sœur Marie-Louise durant la présentation de l’exposition, cette dernière souligne que même si « des sœurs ont quitté leur habit suite aux lois anti-congréganistes […] une trentaine de novices sont restées et ont continué à se former à Guernesey, lieu où elles ont prononcé leurs vœux. »

Chapelle de la Maison-Mère de la Congrégation des Filles de Sainte-Marie de la Présentation

L'heure de la dissolution

Le 5 août 1913, Mère Sainte Thérèse de Jésus est élue Supérieure générale d’une grande Famille qui dépasse alors les 700 membres. Son élection survient dans une période très difficile : les lois anti-congréganistes, depuis 1886, chassent religieux et religieuses de toutes les institutions éducatives et sanitaires de France. La rupture avec le Pape est consacrée par un acte officiel et la loi de séparation de l’Église et de l’État (1905) est appliquée.

Le 31 janvier 1914, un décret de dissolution de la Congrégation des Filles de Sainte-Marie de la Présentation paraît au Journal Officiel. Légalement, les Sœurs de Broons n’existent plus. Le 9 juin 1914, les gendarmes commencent les perquisitions au sein de la Maison-Mère. « Madame, je viens au nom du Gouvernement prendre possession de cet immeuble, et je vous en demande les clés », déclare le Receveur de l’Enregistrement. Mère Sainte Thérèse lit sa « Protestation solennelle » contre cette expulsion. « Nous aimons la France, notre patrie, de toute notre âme, de toutes nos forces. Depuis un siècle bientôt, les Filles de Sainte Marie de la Présentation de Broons lui [ont] accordé tout notre dévouement religieux. […] Et nous sommes expulsées de notre Patrie ? Avec mes Filles, je pardonne à tous ceux qui nous persécutent. » (protestation à lire en intégralité dans le cadre de l’exposition)

Les opportunités de la Guerre 14-18

Exilée à Guernesey, Mère Sainte Thérèse de Jésus se présente au Général Marion, à Rennes. « Général, nous sommes toutes à votre disposition pour le service des blessés. Nous acceptons tous les postes. Cependant, nos préférences vont à Broons où les bâtiments de notre maison-mère sont vastes et inoccupés. » A partir de ce moment-là, et tant que durera la Première Guerre Mondiale, la Maison-Mère des Filles de Sainte-Marie de la Présentation devient un hôpital militaire. Les Sœurs de Broons y soigneront 10.000 soldats blessés. Le 16 octobre 1918, le Service de santé décerne à la Communauté de Broons la Médaille d’honneur des épidémies. Seize religieuses seront décorées de cette médaille.

Cependant, l’année 1921 s’achève sans que soit satisfaite l’attente d’une éventuelle réhabilitation des religieuses. « Je reste tout disposé à saisir le Parlement d’un projet de loi autorisant à nouveau la congrégation des sœurs de Broons », assure Maurice Maunoury, ministre de l’Intérieur. « Considérant des services rendus pendant les hostilités, je m’empresserai de faire instruire la demande qu’elles m’auront adressée à cet effet. »

1923 : date du décret libérateur, la renaissance. De M. Éon, l’avocat des Sœurs de Broons : « J’ai le plaisir de vous annoncer que toutes vos affaires ont été rayées du Tribunal. » Dans un courrier du 29 novembre 1923, Léon Jénouvrier, alors vice-président du Sénat, écrit à la Supérieure générale : « Vous voilà réintégrées dans tous les droits dont vous avait privées l’odieux décret de 1914, notamment dans votre personnalité de Congrégation autorisée et dans la propriété de votre maison-mère. » Le décret paraît au Journal Officiel le 8 décembre 1923.

L'Arbre a grandi

« L’Esprit conduit toujours sur des chemins inattendus, imprévisibles… Il y a toujours un matin neuf. » – Sœur Annetta. A cent ans de sa fondation, et malgré l’épreuve terrible du décret de dissolution, l’institut compte cent maisons en 1928. Chaque Fille de Sainte Marie continue le sillon ouvert par les fondateurs, réalisant la consigne que Mgr Serrand rappelait en ce 5 août 1928 : « Être prêtes, comme Notre Dame, à redire en face de tous les appel, me voici pour faire tout ce que vous voudrez. »

Si les vocations se font plus rares en vieil Occident, les Filles de Sainte Marie de la Présentation n’y poursuivent pas moins leur mission d’évangélisation au sein du système de santé aux États-Unis, de prière, de présence et de service dans les paroisses en particulier auprès des plus pauvres. Tandis qu’au Cameroun et au Congo, jour après jour, se lève et s’affermit l’espérance. « La dissolution de notre congrégation est une part sombre de notre histoire mais il faut que cela nous serve de tremplin aujourd’hui. Les sœurs, en leur temps, ont su rebondir », conclut Sœur Solange.

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