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Retour sur la récollection vécue par les laïcs en mission ecclésiale à Créhen

Jeudi 1er et vendredi 2 février 2024, les laïcs en mission ecclésiale (LEME) du diocèse de Saint-Brieuc étaient invités à participer à une récollection au sein de la Maison-mère de la Congrégation de la Divine Providence, à Créhen. Le jeudi, étaient également présents les prêtres. Tous ont pu bénéficier de l’intervention de Jean-Guilhem Xerri, diplômé de l’Institut Pasteur et de l’École supérieure de commerce de Paris, aujourd’hui psychanalyste, biologiste et auteur.

Récollection des laïcs en mission ecclésiale à Créhen début février 2024

Jeudi matin, Mgr Denis Moutel, évêque de Saint-Brieuc et Tréguier, a ouvert la récollection. « J’ai sous les yeux un beau visage de l’Église diocésaine : baptisés, hommes et femmes. C’est un très beau signe que de vivre des moments ensemble. » Ce sur quoi le Père Hervé Le Vézouët, vicaire général, a rebondi : « C’est une première que ce temps de récollection, pensée comme un temps de ressourcement et de mission, puisse se vivre entre prêtres et laïcs en mission ecclésiale ; auparavant vécus qu’entre LEME. »

Pour Jean-Guilhem Xerri, celui-ci s’est dit « heureux de rencontrer les forces vives de l’Église. Je suis heureux qu’on puisse réfléchir, ensemble, à comment annoncer l’Évangile aujourd’hui. Il est bon de regarder ce que dit la tradition chrétienne de l’humain à l’époque où nous vivons. » Celui-ci a poursuivi en questionnant l’assemblée : « Quelles sont nos bases et que dit la tradition chrétienne de l’Homme d’un point de vue anthropologique ? »

« Nous ne pouvons plus suivre le monde »

« A l’Antiquité, au temps de Descartes ou au moment de la Révolution Française, l’Homme a changé la manière de se regarder à partir de déterminismes sociaux, de territoire, de genre… Aujourd’hui, nous vivons la révolution de l’Homme post-moderne à travers la neuroscience et la génétique. Les révolutions s’accélèrent et sont de plus en plus rapprochées les unes des autres », a pointé Jean-Guilhem Xerri. « La tradition chrétienne nous dit deux choses fondamentales sur la vision qu’elle porte sur l’humain :

  • L’Homme en 3D (3 dimensions) : corps, psychisme, esprit
  • L’Homme est inachevé, en permanence en devenir

On peut affirmer qu’en ce début de XXIème siècle, la vie intérieure connaît une véritable renaissance à travers une quête et une recherche d’intériorité. Nos contemporains sont à la recherche de sagesse qu’ils vont chercher dans la mouvance du ressourcement personnel mais aussi bouddhiste. Les ouvrages sur la méditation, les applications et les stages connaissent un fort succès. Les éditeurs français ne l’avaient pas vu venir il y a de cela encore 35 ans. La méditation est sortie des monastères et est devenue un objet d’étude scientifique. »

Jean-Guilhem Xerri a souligné notamment que « notre intériorité souffrait ». « Cela nous concerne tous. Ce sont des scientifiques, notamment à l’INSERM, qui qualifient cette souffrance de ‘maladie civilisationnelle’ liée l’environnement sociétal : mal-être intérieur et existentiel, hyperactivité professionnelle, trouble du comportement alimentaire, burn-out, addiction de masse. Tout ceci s’immisce dans notre vie ordinaire. » Celui-ci qualifie nos vies de « vies de fou au sens propre du terme, au sens que cela déséquilibre l’Homme ». « Nos fondamentaux sont déséquilibrants : injonction à l’hyperconsommation, ce qui créé de la frustration ; instabilité permanente, ce que certains sociologues appellent ‘le bougisme’ ; illusion de la technoscience à travers le numérique et la technique. »

Jean-Guilhem Xerri a appelé à ne pas tomber « dans l’emprise ». « Nous vivons dans l’instantanéité constante alors que nous avons besoin de nous inscrire dans un temps : un passé, un présent et un futur. Psychiquement, nous ne pouvons plus suivre le monde qui va trop vite. »

« La tradition chrétienne a des éléments de réponse »

Jean-Guilhem Xerri a rappelé que l’être humain a besoin de se préparer à accueillir une vie intérieure. « Resituons cela dans le cycle liturgique pour accueillir la grâce que Dieu nous fait. Notre vie intérieure est fragile et peut être vite polluée. Que nous dit les Pères du désert ? La sobriété est quelque chose de majeur pour ne pas se laisser polluer. Mieux que la sobriété, je préfère la dépollution à tous ces facteurs de risque qui abîment notre qualité de présence. » Ce dernier a assuré que « la tradition chrétienne avait des éléments de réponse ». Jean-Guilhem Xerri a appelé les participants à se questionner : « Où j’en suis de ma liberté avec l’hyperconsommation matérielle et numérique ? La préoccupation de l’autre me permet d’avancer dans mon humanité : compassion, charité, solidarité… Nous ne sommes pas faits pour nous regarder le nombril. Ne pas essayer de développer la bonté, c’est aller contre la nature humaine. Il y a quelque chose de transformant dans l’exercice de la bonté et favorise ma santé personnelle. Les Pères de l’Eglise parlent de santé spirituelle. »

Jean-Guilhem Xerri a souligné l’importance de la prière qui permet « de prendre de la distance avec nos pensées et de s’unir à Dieu ». Ce dernier a rappelé que les personnes les plus susceptibles à l’épuisement sont « les plus investies dans une cause : les infirmières, les travailleurs sociaux, les enseignants, les prêtres, les laïcs en mission ecclésiale… Comment, alors, nourrir leur recherche de sens et de don ? Comment contourner la peur du vide, de l’échec de l’ennui ? » Jean-Guilhem Xerri a pointé du doigt le numérique « qui porte une responsabilité évidente dans l’épuisement. Je ne veux pas faire du numérique le bouc émissaire, il n’est pas le seul élément mais il est central. Les écrans sont partout jusque dans les chambres, au restaurant… Jamais notre cerveau n’a reçu autant d’informations. Il y a 40 ans, il n’y avait que la radio, la télé et la presse papier. Les écrans ne captent pas notre intelligence mais notre attention. »

En conclusion : « laisser Dieu agir »

« Se reposer est un acte qui est devenu une décision alors que c’est naturel. Quand on dit ‘décision’, on dit ‘discernement’. Décider de se reposer appelle au courage car cela peut être mal perçu », a expliqué Jean-Guilhem Xerri. « Se reposer n’est pas si évident, se reposer n’est pas synonyme de ne rien faire. Notre cerveau continue de tourner et de travailler ! » Celui-ci a appelé les participants à se demander sur qui (ou quoi) ils se reposaient : un proche ? un accompagnateur spirituel ? une expérience fondatrice ? une Parole, un Saint ? Jean-Guilhem Xerri a conclu son propos en proposant de « laisser Dieu agir ». « Comment j’entre dans cette logique ? Quand je me retire, comment je laisse agir le Seigneur ? Quand j’ai fait ce que j’avais à faire, comment j’entre dans le non-agir qui est le temps de Dieu ? Il y a un temps pour tout, appuyons-nous par exemple sur les temps liturgiques ! Même la nature a besoin d’alternance à travers les saisons. »

Extrait de l'homélie prononcée au terme de la récollection

40 jours après la fête de la Nativité, c'est la fête de la Présentation de Jésus au Temple que nous propose le calendrier liturgique, qui situe cette fête dans le prolongement du cycle de Noël même si nous sommes dans le temps ordinaire. Cette fête de la Présentation de Jésus au Temple est sous le signe de la lumière avec ce rite proposé au début de notre célébration. Marie et Joseph accomplissent donc ce rite prévu par la loi juive d'offrir leur enfant à Dieu. [...] Cette lumière vient rejoindre tous les peuples, c'est ce que dit Siméon, donc pour nous-mêmes qui l'avons reçue aussi au jour de notre baptême. [...] C'est un beau cadeau que de célébrer cette fête de la Présentation de Jésus au Temple le jour de la fête mondiale de la Vie consacrée, le 2 février, date choisie par le Pape Jean-Paul II en 1997 ; fête placée sous le signe de l'action de grâce et dont nous nous associons. Toute l’Église rend grâce pour ce don de la vie consacrée en son sein. [...] Le Pape François avait aussi voulu souligner cette importance de la vie consacrée, de cette vocation particulière en proposant une année de la vie consacrée il y a dix ans, en 2014. [...] Parmi les jeunes générations, mais pas uniquement, il y a des aspirations qui rejoignent celles qui ont motivées votre engagement à la vie consacrée et qui se vivent, qui se cherchent et qui s'expérimentent autrement aujourd'hui. [...] Je pense à la place de la prière dans nos vies à tous, mais aussi la place de l'engagement dans le monde. Je pense aux aumôniers dans les établissements scolaires, dans les hôpitaux, au service de la catéchèse... Tout ça continue de s'écrire. L'Esprit continue de faire son œuvre et d'inspirer des façons renouvelées de se mettre au service. Nous sommes appelés à témoigner car le Seigneur continue de se donner. Il continue de venir à nous.
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Père Hervé Le Vézouët
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